Fraise blanche : culture, goût, prix… ce qu’il faut savoir sur cette variété étonnante

Plus petite qu’une fraise classique et au goût d’ananas, la fraise blanche est une curiosité qu’il est difficile de se procurer. Pourtant, il est possible de la cultiver au jardin.

Gariguette, ronde ou des bois, la fraise est la star incontestée de nos repas estivaux. Une autre variété, moins connue, pourrait se retrouver sur votre table cet été : la fraise blanche.

Au premier coup d’œil, sa couleur ivoire peut faire douter : s’agit-il d’une fraise qui n’est pas mûre ou qui a subi une transformation génétique ? Pas du tout. Venue du Chili, elle est importée en France sous le règne de Louis XIV.

Mais alors, pourquoi n’en avez-vous jamais entendu parler ? Cette fraise est en effet méconnue des Français. Et pour cause, il est rare de la trouver sur les étals des primeurs ou dans les marchés.

Culture, histoire, prix, mais surtout pourquoi vous n’en avez jamais mangé… On vous dit ce qu’il faut savoir sur cette fraise rare.

Un goût d’ananas
Pas facile de décrire le goût d’un fruit à l’écrit. Pour avoir la meilleure description possible, actu.fr a contacté Jacques Bertrand, un expert de la fraise blanche, puisqu’il la cultive depuis dix ans à Sainte-Marthe, dans le Lot-et-Garonne.

« Elle est très parfumée au nez. En bouche, elle est très savoureuse et légèrement acide », explique-t-il. Au goût, on se rapproche de l’ananas, même si ce n’est pas « aussi prononcé », reconnaît le responsable commercial d’une pépinière.

Son aspect diffère également : molle et juteuse, elle n’a « aucune tenue », d’après le professionnel du secteur.

Cette fraise blanche se distingue aussi par sa taille. Avec ses 5 g, elle est bien plus petite que ses cousines. « C’est un peu plus gros qu’une fraise des bois (2 g) mais c’est bien plus petit qu’une fraise conventionnelle (15 g en moyenne) », note Jacques Bertrand.

Quand elle est trop mûre, la fraise tend vers le rose très pâle. « En revanche, on voit toujours que c’est une fraise blanche », ajoute-t-il.

Niveau allergies et apports nutritionnels, elle est sur la même ligne que les autres variétés de fraises.

Plants et graines : où en trouver ?
La fraise blanche vous intrigue et vous aimeriez la goutter ? Sachez qu’il est tout à fait possible de la planter dans votre potager.

Pour vous procurer des graines, il faut se tourner vers un horticulteur. « Ils sont tournés à 100% vers le marché amateur. Les pépiniéristes, c’est pour les professionnels », rappelle Jacques Bertrand.

Plus rares que ses cousines, graines et pieds de fraisier blanc ne se trouvent pas dans les rayons de vos magasins de jardinage. Certains, à l’instar de Truffaut ou Gamm Vert, disposent d’une fiche produit sur cette fraise rare. Cependant, elles sont indiquées « non disponible » à la vente.

Comment cultiver des fraises blanches dans votre jardin
Une fois au jardin, elle se cultive « comme une fraise conventionnelle », nous répond l’ingénieur agricole. À un détail près : un plant de fraises blanches ne peut pas être cultivé seul.

Un particulier peut tout à fait en planter dans son potager. Je le recommande même. Il ne faut pas avoir peur. Ce n’est pas plus compliqué que les autres.

Jacques Bertrand
Ingénieur agricole et responsable commercial des pépinières Martaillac

Pourquoi cela ? Car la variété est autostérile. En botanique, ce terme veut dire qu’une plantation a besoin d’une autre plante, de la même espèce, pour être fécondée.

En clair, la fleur du fraisier blanc ne se féconde pas de son plein gré. Or, s’il n’y a pas de pollen, la fleur n’est pas fécondée et ainsi, ne peut donner de fruits. Pour obtenir des fraises blanches, il faut que le pollen vienne d’ailleurs.

En la plaçant à côté d’une autre plante qui produit du bon pollen, le plant de fraisier blanc profite du pollen du voisin, et ainsi, peut être fécondé. Jacques Bertrand préconise de le planter des fraises traditionnelles. « Des gariguettes le cas échéant », ajoute-t-il.

Cette spécificité est la seule difficulté à intégrer. Pour le reste, la marche à suivre est identique aux autres variétés de fraises.

Quand planter ses fraisiers ?
Blanches ou rouges, les fraises suivent les mêmes règles en matière de plantation.

Les fraisiers se plantent toute l’année. Mais, la période idéale est entre mi-août et mi-octobre. Les plants ont ainsi le temps de s’enraciner avant l’arrivée de l’hiver. Ils se plantent dans toutes les régions de France. Pour les variétés remontantes (qui produisent des fruits plus d’une fois dans l’année), mettez-les en terre en mars-avril.

Pour le sol, les fraisiers aiment les sols neutres, voire légèrement acides. Dans tous les cas, sans calcaire. Concernant l’exposition, les fraisiers ont besoin de beaucoup de lumière.

30 euros le kilo
Alors qu’elle est plutôt simple à cultiver, il est rare de la voir sur nos étals de marché ou dans les rayons de nos supermarchés. Pourquoi cela ? La réponse se trouve peut-être du côté du prix. « Ce n’est pas donné », estime Jacques Bertrand. En effet, pour déguster des fraises blanches, comptez 30 euros le kilo.

Un prix qui se justifie par le coût de la cueillette.

On n’en ramasse pas beaucoup par heure comme elles sont fragiles et délicates contrairement aux fraises conventionnelles. Pour le même investissement, on ramasse moins de fraises blanches que de rouges.

Jacques Bertrand
Ingénieur agricole et responsable commercial des pépinières Martaillac

C’est sans compter sur un autre facteur qui pèse sur le prix : la faible production par pied. Un pied de fraisier classique donne une trentaine de fraises, soit plusieurs centaines de grammes. Chez les blanches, le rendement chute : « Quand on arrive à 100 g, on est contents », explique l’expert du fruit phare de nos étés.

Une productivité moindre pour le même investissement : le travail en amont et le soin apporté aux cultures (couper les feuilles par exemple) est le même que pour un fraisier conventionnel.

« Si elles ne sont pas vendues à 30 euros le kilo, ce n’est pas rentable », synthétise l’agriculteur.

Un contexte difficile pour les fraises
Un prix qui peut être dissuasif. Et pour Jacques Bertrand, le contexte actuel, c’est-à-dire la baisse du pouvoir d’achat et l’inflation, n’arrange rien.

Dans sa pépinière située dans le Lot-et-Garonne, Jacques Bertrand cultive 250 variétés de fraises. Les fraises blanches représentent 1% de la surface de sa ferme. « Je ne peux pas faire plus, car je n’ai pas le marché en face. C’est déjà compliqué pour la classique, car elle reste chère par rapport aux fraises importées », regrette-t-il.

Quel avenir pour cette variété ?
Poussé par la curiosité, Jacques Bertrand est un des seuls en France à cultiver la fraise blanche. « J’en connais une dizaine », souffle-t-il, rappelant qu’ils sont plus de 4 000 producteurs de fraises traditionnelles dans l’Hexagone.

Pour l’ingénieur agricole, l’avenir de la fraise blanche est compromis. Non pas à cause de son prix, mais à cause de sa difficile mise en rayon.

Trop molle et trop juteuse, la fraise blanche ne peut pas supporter le transport aussi bien que les fruits et légumes. Même chose pour le temps de transit (deux ou trois jours avant d’être mis en vente). « Elle doit être vendue le jour même ou le lendemain », ajoute notre expert.

Il y a beaucoup de contraintes pour atteindre le grand public et pour être connue.

Jacques Bertrand
Ingénieur agricole et responsable commercial des pépinières Martaillac

Mais il garde espoir. « La fraise blanche n’est pas vouée à disparaître, car il y a des passionnés », lance-t-il. Et si vous en plantiez dans votre potager à la fin de l’été afin d’y contribuer ?